Afrique du Sud, le pays où le braai (barbecue) est roi

(Photo Coral Browne)

Véritable institution en Afrique du Sud, le braai (le barbecue) est passé du statut de coutume culinaire à pratique ancrée dans la réalité sociale. "Alors que la culture sud-africaine est fragmentée par groupe social, le braai est un élément culturel qui transcende ces différences. Tout le monde en fait: riches comme pauvres, noirs comme blancs, Xhosas comme Zoulous"...

(Photos Kobus Braai et Illies Boussaha)

Dans son ouvrage Quelque chose d'Afrique du Sud, publié début 2020 aux Editions Nanika, Camille Hinas propose un guide personnel et engagé qui, au-delà des idées reçues, trace un panorama complet de "tous ces petits quelque chose qui font l’âme" de la nation arc-en-ciel.

(Photo Kobus Braai)

Qui sont les Khoisans et les Bantous ? Pourquoi y a-t-il 11 langues officielles dans le pays ? Qu’est-ce qu’une sangoma ? A quels enjeux sociaux la Rainbow Nation doit-elle faire face ? Comment protéger son formidable patrimoine naturel ? La jeune auteure s'attache à montrer que l'Afrique du sud ne mérite pas d'être réduite  "à un régime raciste (l'apartheid), à une seule figure libératrice (Nelson Mandela) ou même aux Big 5 (les animaux sauvages emblématiques de la savane et des safaris)".

Illustration Camille Hinas

Côté cuisine, Camille montre que chez les Sud-Africains "l'amour de la viande ne s'arrête pas au braai". Les habitants raffolent également du biltong, ces petits-en cas de viande séchée, la plupart du temps de boeuf, mais aussi d'autruche ou d'antilope (springbok, gemsbock ou koudou) que l'on mange à l'apéritif, entre deux tranches de pain ou avec une salade.

Inventé pendant le Grand Trek (la migration de plusieurs milliers de fermiers Boers de la colonie du Cap vers l'intérieur des terres dans les années 1835-40...), il permettait aux migrants de disposer d'un stock de protéines peu encombrant et facile à transporter. A partir de la technique mise au point par les Khoi-Khoi (une population autochtone de pasteurs) qui séchaient la viande à l'air libre ou dans du sel, les colons se sont appropriés le concept en accélérant simplement le processus de séchage grâce à du vinaigre.

Mais nous dit Camille, au quotidien, la super-star de la cuisine du pays -et de l'Afrique sub-saharienne dans son ensemble- est le pap, une bouillie (type polenta ou porridge) de farine de maïs blanc connu sous le nom de ncima en Zambie et au Malawi, de phaletshe au Botswana, d'ugali en Tanzanie...

D'importation récente en Afrique (par le biais de la colonisation...), cette nourriture qui cale les estomacs pour pas cher a séduit les foules et remplacé bien des recettes traditionnelles dans l'alimentation quotidienne. "Le porridge du matin se mange chaud, dans un bol, on y ajoute du sucre, parfois du pain de mie. Le pap du midi (ou du soir) s'accompagne d'une sauce gravy à la tomate et aux oignons". 

(Photos Ji-Elle)

Malgré l'inexorable disparition des traditions culinaires, certains savoir-faire subsistent, comme le morogo wa diwana, ces petites boulettes de feuilles de haricots séchées dont les Sud-africains sont très friands. 

A noter, pour lutter contre la malnutrition et l'obésité dans les townships (fléaux liés à la pauvreté et à l'urbanisation  non contrôlée), l'apparition du phénomène d'urban farming (agriculture urbaine) et les jardins partagés gérés par des associations qui viennent en aide aux populations défavorisées.

Carte Estate Selection

Aux visiteurs soucieux de gastronomie, Camille recommande le Cape Malay, certains des meilleurs restaurants de Cape Town étant malais. La nourriture malaise trouve ses racines avec l'arrivée d'esclaves malaisiens et indonésiens qui ont importé sur les côtes africaines leurs épices et leur façon de cuisiner. Métissée avec ingrédients locaux, d'autres épices importées par les immigrés venus des Indes et le savoir-faire européen, cette cuisine malaise est bel et bien entrée dans la culture sud-africiane dont elle est partie intégrante.

Le tableau ne serait pas complet sans un chapitre sur les stars inconstestées de la cuisine sud-africaine depuis la fin de l'apartheid: les vins de la région du Cap (dont les célèbres vignobles de Stellenbosch) et le roïbos, infusion sans théine qui provient des feuilles d'un buisson rouge, l'Aspalatus linearis.

Quelque chose d'Afrique du Sud, Camille Hinas, Editions Nanika