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Du Bruit Côté Cuisine
29 février 2024

Le Paris de Claude Sautet, Entre cafés aux vitres embuées et petites brasseries

(Parigramme/Coll Sautet/D.R.)

"Classique, authentique et populaire, le Paris de Claude Sautet juxtapose (...) des brasseries de quartiers, des troquets désuets, une ou deux riches enseignes et quelques discrets symboles de l'élégance intemporelle à la française. De ce creuset rare et précieux, le cinéaste a extrait sa vision de la Ville lumière, une image éternelle et transfigurée d'un Paris qui n'est plus tout à fait celui de Marcel Carné et de Jacques Prévert, mais qui coudoie celui de Louis Malle, d'Alain Resnais ou d'Agnès Varda"... 

Dans le bel ouvrage Le Paris de Claude Sautet qu'elle a publié en septembre 2020 dans une maison d'édition dédiée à la capitale et dont il est bon de se souvenir pour le centenaire de la naissance du cinéaste, la journaliste Hélène Rochette raconte un cinéaste dont le cinéma "demeure à jamais celui des cafés aux vitres embuées et des petites brasseries de Paris".

Tissée d'instantanés de vies saisis au ras du bitume, "sa filmographie dessine des parcours citadins très éloignés des parcours touristiques. Intime, familier, sans esbrouffe, le Paris de Claude Sautet, même s'il est estampillé Rive gauche, ignore somptueusement la Coupole, la Closerie des Lilas, le jardin du Luxembourg, les Deux Magots... Ce que le cinéaste capte avec justesse, c'est la fébrilité de citadins pris dans la nasse d'un destin qu leur échappe".

Des Choses de la vie et Vincent, François, Paul et les autres à Nelly et M. Arnaud en passant par Max et les ferrailleurs, César et Rosalie ou Mado, ce portraitiste de la classe moyenne et de la bourgeoisie prospère des Trente Glorieuses sait aussi utiliser la sphère de l'intime pour décrire une ville en mutation bientôt confrontée aux conséquences des chocs pétroliers. Braquant son regard "vers les habitants plutôt que vers les palissades de chantier", il embrasse "les conséquences de la modernisation à échelle humaine" et tend un miroir au Paris ouvrier et des banlieues populaires en train de disparaître.

Enfant de Montrouge et banlieusard de cœur, ce sédentaire qui n'a jamais quitté le quartier des Gobelins dans lequel il s'était installé dans les années 1950 se décrivait comme un pur Parisien. "Marcheur insatiable et gourmet gourmand, il sillonne la capitale et sa périphérie, guidé par les plaisirs de la bonne chère et par la nostalgie de ses escapades enfantines dans les forêts franciliennes".

Un parcours de vie dont Hélène Rochette retrouve les traces dans les longs métrages de Claude Sautet. "Dans ses films comme dans sa vie, des grappes d'amis désunis, des flopées d'amants inconsolés vont, viennent, s'éparpillent et s'écharpent le long d'un sentier dans l'habitacle resserré d'une voiture, en plein coeur de la ville ou dans les recoins de belles villas de la campagne francilienne".

 

(D.R.)

Incontournables dans l'oeuvre de Sautet, les scènes d'agapes dans des bistrots, au cours d'un mariage campagnard ou à l'occasion d'un festin dominical entre amis sont, pour l'auteure, l'expression d'une forme d'élégance des héros de ses films"des êtres englués dans leur solitude existentielle mais capables encore de maquiller leurs désillusions sous l'allégresse collective, l'éphémère jovialité et le brouhaha des échanges de comptoir".

Le Paris de Claude Sautet, Hélène Rochette, Editions Parigramme

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