Guide de survie pour le mangeur européen en Côte d'Ivoire
"Ce livre, c’est la Côte d’Ivoire pour les nuls, un bric-à-brac de mes impressions sur le pays, un généreux préambule à l’immersion culturelle, un guide de survie destiné à ceux qui veulent comprendre la Côte d’Ivoire, ne serait-ce qu’un peu".
A ceux qui ont l'intention de se rendre en Côte d'Ivoire pour leur premier voyage en terres africaines, Nathan Sologny propose quelques clés pour leur permettre de "se perdre admirablement dans ce pays", d'y "vivre ce qu'on n'était pas préparé à vivre" et de "reconnaître ce qu'il (y) a de parfaitement banal".
Côté cuisine et habitudes alimentaires, Quelque chose de Côte d'Ivoire, publié au printemps 2018, devrait préparer le lecteur à se familiariser avec des ingrédients et des préparations inconnus (car peu distribués ou pratiqués en dehors du continent africain) et avec un rapport à la nourriture et à la convivialité bien différent de ce que l'on connait en Europe.
Pour le déjeuner, les plats de prédilection des Ivoiriens sont par exemple le riz et le foutou en sauce (une boule compacte d’igname, de banane plantain, un mélange des deux ou parfois d'un tubercule comme le tarot) ainsi que le garba (un plat de poisson frit -du thon, la plupart du temps- servi avec de l’attiéké (de la semoule de manioc) et des condiments -piments, oignons, tomate-) et le placali (une boule très élastique préparée avec du manioc fermenté et qui se mange souvent avec des sauces "bien gluantes". Les plats en sauce sont généralement cuisinés avec de la viande de boeuf (il s’agit en fait de zébu) ou du poisson bouilli dans la sauce.
Les sauces -qui ressemblent plus à des soupes- sont faites avec des plantes locales: sauce arachide, sauce aubergine, sauce graine, sauce feuille, sauce gombo, sauce djoumgblé. On consomme aussi en Côte d'Ivoire des ragouts, des sandwichs de spaghettis, des plats sénégalais comme le tchèpe ou du mouton braisé avec de l’attiéké.
Dans les restaurants, "comme dans bien d’autres lieux en Côte d’Ivoire, le premier arrivé n’est pas nécessairement le premier servi: il faut savoir s’imposer et avoir une grande gueule". .. Quand il n’y a pas de file d’attente, "allez directement vers la cuisinière, demandez ce qu’il y a au menu ("C’est quelle sauce ? "), passez la commande et installez-vous".
Pour chaque plat, les Ivoiriens ont mis au point une façon particulière de manger. Le riz en sauce est servi dans deux plats différents : le riz d’une part, et la sauce avec la viande (ou le poisson) d’autre part. "Ce plat se mange avec la cuillère, que vous utilisez pour verser la sauce dans le riz (et pas le contraire !). Pour le foutou, vous aurez deux assiettes aussi, mais le tout se mange avec les doigts. Prélevez avec les doigts un morceau de foutou et trempez-le dans la sauce. Il est toléré de manger le foutou avec la fourchette, mais certains vous diront que de cette manière, la nourriture ne sera pas aussi bonne qu’avec les doigts".
L’attiéké, quant à lui, se mange toujours avec les doigts et il faut le paumer, c’est-à-dire "en faire une boule compacte dans votre main. Une fois la boule en main, essayez d’attraper dans la même main quelques condiments et de tout mettre dans la bouche. Si l’attiéké est accompagné de soupe, cette dernière (ainsi que sa viande ou son poisson) se prendra avec une cuillère à soupe, mais l’attiéké toujours avec les doigts".
En matière de piment, les Ivoiriens ne sont clairement pas raisonnables. En Côte d’Ivoire, le contraire de pimenté est fade. Ainsi, "demander à la cuisinière ou au cuisinier si son plat est fait avec du piment est inutile et revient à lui demander en toute courtoisie si son plat est insipide".
Si vous êtes invité à "manger Ebola", pas de panique, votre interlocuteur parle de viande de brousse, vraisemblablement de l’agouti (une sorte de ragondin) ou du rat. Le terme Ebola vient du fait qu’au plus fort de l’épidémie, la consommation de viande de brousse était interdite. Même si manger Ebola ne comporte aujourd'hui plus de risque pour la santé, cela peut cependant présenter un problème éthique, car il peut s’agir de viande d’animaux menacés d’extinction comme le pangolin, certains céphalophes (biche ou gazelle) ou des serpents en voie de disparition. C’est beaucoup plus rare, mais il peut aussi être question de viande d’hippopotame, de singe ou d’éléphant.
Un livre tonique et sans tabou, au plus près de la vie quotidienne en Côte d'Ivoire qui devrait donner au lecteur "l’audace de lacer bien haut (ses) chaussures, de sangler (son) sac à dos et de laisser (son) guide touristique à l’hôtel car, explique Nathan Sologny, "maintenant, la Côte d’Ivoire, vous en avez le mode d’emploi".