Le (Top Chef) Fabien Morréale ravive le goût du cabanon provençal

(Photo Franck Buschardt)

Si Fabien Morréale est bien passé par l'épreuve Top Chef, il n'a, de son propre aveu, "jamais lu un livre de philosophie" ni jamais eu l'ambition de s'illustrer sur les bancs de l'université. 

Cela n'a pas empêché le jeune chef établi à Martigues de faire oeuvre littéraire commune avec Vladimir Biaggi, agrégé de philosophie, de quelques années son aîné et auteur entre autres d'ouvrages comme Le nihilisme (Editions Flammarion) ou Nietzsche (Armand Colin) assez éloignés, il est vrai de la gastronomie. Ce qui a réuni ces deux êtres a priori peu faits pour se rencontrer, c'est leur amour commun pour la Provence et leur passion pour l'un des symboles les plus emblématiques de son patrimoine: le cabanon.

Dans "Le goût du cabanon, Recettes, savoirs et légendes" (Eanna Editions), Vladimir et Fabien mettent en commun "un imaginaire, celui d’une durée faite de plaisirs simples, de convivialité joyeuse et d’humeur heureuse : une parenthèse dans des temps fiévreux" pour célèbrer ce hâvre de paix  "pas plus grand qu'un mouchoir de poche", lieu de détente favori des petites gens de la côte autour de Marseille et de l'arrière-pays provençal et devenu un haut lieu de l'art de vivre méridional et de sa cuisine.

Universitaire patenté, Vladimir explique ce qu’est ce lieu de légende(s) avec force notations culinaires et anecdotes destinées à rendre vivants les gestes de jadis. En cuisinier médiatique à la notoriété montante, Fabien s’emploie à revisiter certaines des recettes cabanonnières pour les inscrire dans la modernité. Une complicité qui leur permet de renouer avec l’esprit du cabanon : bons produits du marché, légumes de saison savoureux, recherche, créativité et, au bout du compte, de jolis moments de partage et de gourmandise.

Au fil des pages de ce bel ouvrage, un portrait de la Provence gourmande, passée et actuelle, se dessine. Avec ses Apéros (anchois à l'huile ou en marinade, tapenade, limaçons, panisses frites au ketchup de betterave), ses salades (de pois chiches ou de pissenlit), ses soupes (aux fanes de radis ou au pistou, son Aigo-Bouido), ses entrées (beignets d'orties de mer ou de sardines, brandade de morue, riz aux favouilles, poulpe en sauce rouge ou rillettes de maquereau), son agneau de la Crau et tian de légumes, son hamburger à al provençale, ses rognons au vin rouge, ses pâtes à l'ail, au fenouil ou figatellu, son omelette aux asperges,  ou ses alouettes sans tête...

Et pour finir, avant la sieste à l'ombre des pins... Gelée de coing, confiture de figues, vins d'orange, de myrte et de noix, chocolat thym-citron, baba au pastis et au fenouil mettront lune dernière note sucrée aux agapes cabanonnières.

Un beau livre où se mêlent culture, histoire, cuisine, patrimoine de la région Provence et où les photos de Frank Buschardt parviennent à inscrire "les saveurs et les savoirs du passé dans une création contemporaine".

Le goût du cabanon, Vladimir Biaggi et Fabien Morréale, Editions Eanna